Changement de modèle, nos associations s’adaptent

Depuis une dizaine d’années, nous assistons à une concentration de notre secteur avec le regroupement d’associations ou l’arrivée sur le territoire d’associations ou de fondations nationales et/ou régionales à la stratégie forte de développement et de diversification.

L’évolution du modèle économique et de contractualisation, le passage du partenariat à la prestation, portés et encouragés par l’Etat, accompagnent et accélèrent ce mouvement. Dans les années 90, un besoin était repéré par une ou plusieurs associations locales, une réponse était présentée, pensée, travaillée avec les acteurs institutionnels (DDASS, Département, DDE, EPCI, …). Le projet pouvait ainsi émerger dans le cadre d’une co-construction et une adaptation aux besoins spécifiques du territoire. Cette relation de gré à gré avec initiative associative a connu une première évolution avec le développement des appels à projets, modèle plus descendant et nécessitant d’entrer dans un cadre pré défini.

Ces appels à projets ont connu eux-mêmes une évolution depuis ces 5 dernières années avec des réponses à apporter sous forme de consortium locaux difficiles à porter par des associations de petites tailles (lourdeur administrative, redistribution des financements,…), puis de cahier des charges imposant des réponses sur plusieurs départements voire régions. Les structures de plus grandes tailles, les regroupements sont ainsi favorisées dans un mouvement qu’ont connu et connaissent bailleurs sociaux, 1% logement, …. Le modèle de l’association locale, ancrée sur un territoire et participant à son développement, à des actions de proximité, à des réponses à des besoins parfois révélés par « des signaux faibles » mais perceptibles par une connaissance fine, historique, articulée entre les publics, les partenaires associatifs et institutionnels risquent progressivement de disparaitre. Cette disparition entrainant en parallèle l’affaiblissement de la démocratie locale porté par les administrateurs engagés dans ces associations de proximité.

Est-il possible de lutter contre ce mouvement de fond ?

Nous pouvons déjà éviter d’y contribuer par notre propre stratégie de développement. Pour ce qui concerne notre Groupement, nous favorisons ainsi le modèle de l’essaimage plutôt que celui de l’implantation dans de nouveaux territoires. L’essaimage s’appuie sur les ressources locales et ses spécificités. Il y a apport puis transfert de compétences vers les acteurs locaux avant de se retirer pour se recentrer sur son propre territoire. Ainsi, lorsque l’une de nos initiatives nous paraît cohérente au regard des besoins des publics, nous la proposons à d’autres soit par notre intervention en appui ponctuel et/ou par des outils en libre accès. Cela a été le cas pour le dispositif d’accès à l’emploi Step’s, pour la plateforme ViP ou celle de développement du travail pair. Nous ne cherchons pas à étendre géographiquement nos activités mais à promouvoir et essaimer celles auxquelles nous croyons. Si on nous prend un de nos modèles ce n’est pas un problème mais la confirmation de sa pertinence. En retour, nous pouvons procéder de même, en lien avec le porteur de projet initial, en adaptant sur notre territoire des initiatives prises ailleurs (« Premières heures », par exemple adaptées en Step’s).

Nous pouvons nous regrouper entre associations locales sous formes juridiques avec mutualisation des moyens comme le Groupement des Possibles, ou pour un projet spécifique (création de l’association du « collectif Villa Clément » avec MFI, RSA 38, Cycles & Go, création du GCSMS Un Chez Soi d’Abord avec point d’Eau, le CHAI, le CCAS de Grenoble, …).

Nous pouvons aussi concevoir des partenariats rapprochés par des portages conjoints d’actions (exemple de Totem co-porté avec le Centre de soins Infirmiers Abbé Grégoire et Un Toit pour Tous), par des concertations en amont des réponses à appel à projet pour des réponses collectives ou articulées (appels à projet de la Trajectoire 2022-2024). Ces organisations, peuvent paraître lourdes en temps et investissement mais elles sont riches des diversités associatives, évitent un entre soi permettant peu d’interroger ses pratiques, et engagent des dynamiques axées sur la coopération plutôt que la concurrence. Elles maintiennent les structures locales quelle que soit leur taille et peuvent même les consolider par mutualisation des réponses. C’est une voie différente de celle des fusions absorptions, des déploiements territoriaux d’organisation à dimension nationale ou régionale qui présentent le risque d’aplanir toute aspérité locale, de se centrer sur les commandes des politiques publiques avec peu de force de proposition liée aux besoins territoriaux en retour.

Francis Silvente

Directeur Général Groupement Des Possibles

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s